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Comité de Liaison et d'Action pour la Photographie

Tribune - Libération

Le 25 mars dernier, la conseillère d’Etat Laurence Franceschini est missionnée par le ministère de la culture pour établir un état des lieux du financement et de la diffusion des œuvres photographiques. Vaste mission, compte tenu de l’ampleur des dysfonctionnements qui occasionnent une fragilité et une précarité du métier de photographe et de tout son écosystème. Ce rapport a été livré l’automne dernier comme on l’apprend dans l’article de Télérama du 10 mars 2022, mais à l’aube de l'élection présidentielle, le retard de publication de ce rapport inquiète. Le 18 mars, nous entrerons dans la période de réserve électorale qui paralyse toute action concrète au sein des ministères risquant l’abandon de ce rapport. Face à cela, le comité de pilotage des États généraux a publié une lettre ouverte au ministère.

L’ensemble du secteur de la photographie oscille depuis plusieurs années entre espoir et désarroi. S’il a fallu attendre 170 ans pour la création d’une Mission de la photographie en 2010 par Frédéric Mitterrand au sein du ministère, c’est en 2017, que Françoise Nyssen décide de la transformer en délégation avec la volonté réelle de faire de la photographie un secteur à part entière. Mais fin 2021, sous la houlette de Roselyne Bachelot-Narquin, cette délégation est rétrogradée au rang de département rattaché aux arts visuels. Un message qui passe difficilement auprès des professionnels.

"Nous sommes face à un paradoxe: le marché de la photographie est en pleine croissance mais il ne profite pas aux créateurs. Pour assurer la diversité et la richesse de la production française, il est primordial de réaffirmer et protéger la place des photographes dans cet écosystème et de mettre en place un système vertueux et circulaire du partage de la valeur de l'image fixe" - Extrait de la lettre de mission signée par la ministre

Pour établir ce rapport, Laurence Franceschini s’est entretenue avec une quarantaine de professionnels du secteur, tous domaines confondus. Ces auditions ont permis de définir les nombreuses problématiques auxquelles des solutions ont été soumises. Le chantier est immense, mais sans mesures concrètes rapides, les métiers de la photographie, dont la fragilité a été accentuée par la crise sanitaire, vont disparaître.

À l’heure où l’image et la photographie prennent une place prépondérante dans nos sociétés, il est urgent que les pouvoirs publics protègent nos auteurs et repensent nos modèles économiques !

 

Promouvoir la photographie française !

Si la photographie est née sur notre territoire,la France peine à donner la part belle à ses photographes. Dans les grands musées et institutions français comme dans les grandes manifestations, la photographie française est largement sous-représentée[1]. On remarque que plus les structures ont de moyens, moins elles donnent de visibilité à la création française contemporaine. Un comble dans la mesure où la France, en proportion, est le pays qui expose le plus la photographie. Comment peuvent vivre les photographes s’ils ne trouvent pas d’écrin de représentation dans leur propre pays ? Comment peuvent-ils également être présents sur le marché international ? Si une prise de conscience au niveau de notre territoire semble être nécessaire, la création d’un lieu plus particulièrement dédié à la photographie nationale, comme on peut le voir chez nos voisins, pourrait offrir un rayonnement à nos photographes et ainsi augmenter leur valeur artistique en vue de créer un système économique circulaire et vertueux.

 

Les dysfonctionnement liés à la presse

Alors que les éditeurs et agences de presse bénéficient d’aides financières publiques, comme le Fonds stratégique pour le développement de la presse, les agences et collectifs de photographes qui collaborent au quotidien avec la presse ne peuvent prétendre à ces fonds. Étant de bien plus petites structures, et donc plus fragiles, elles devraient pouvoir bénéficier des mêmes aides financières et aménagements fiscaux.

Autre danger, aujourd’hui, lorsqu’un média passe commande à un photographe, une demande de syndication de contenu est alors presque systématiquement demandée. Cela impose au photographe de céder ses droits, permettant au média la revente des images. Rappelons que la vente d’archives est une partie importante de la rémunération des photographes et que cette imputation fragilise encore davantage le métier. Les photographes rejetant cette demande voient leur nombre de commandes baisser en flèche. Ces pratiques ne devraient pas être permises !

 

Face aux GAFAM

L’explosion des différentes plateformes des géants du GAFAM a mis en péril la valeur des photographies sur internet, puisque les contenus réutilisés sur ces plateformes ne sont pas rémunérés ! C’est alors qu’interviennent les « droits voisins », qui permettent aux agences ou aux éditeurs de presse d’être rémunérés pour leurs contenus. Si des accords ont été convenus directement avec certaines agences comme l’AFP, ce sont les organismes de gestions collectives qui pourront percevoir ces droits, les modalités ne sont pas encore connues, mais les auteurs ne sont pas tous affiliés à ces sociétés de gestion, les agences de photographes et les structures de photographie qui représentent les auteurs ne sont également pas directement concernées. Cela fait craindre que la redistribution des droits voisins ne soit ni complète ni juste. Il reste essentiel de pouvoir tracer les photographies pour une parfaite transparence d’utilisation. Le géant Google cherche à imposer un nouveau format de fichier d’images qui rendrait caduque l’intégralité de nos contenus.

Nous demandons la publication de ce rapport dans son intégralité pour la mise en œuvre des actions nécessaires.

Ne pas rendre public et ne pas suivre les recommandations de ce rapport pour restaurer et protéger l'économie de ce fleuron de la culture française serait une preuve flagrante d'absence de politique culturelle ambitieuse.

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Pour les photographes, que fait le gouvernement?

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